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| MAROC Villes Impériales | |
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Pierre AUBREE Admin
| Sujet: MAROC Villes Impériales Mar 25 Sep - 8:42 | |
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| Sujet: MAROC Villes Impériales Mar 25 Sep - 8:45 | |
| page 6 Rabat. Les Oudaïa.
Dernière édition par Pierre AUBREE le Dim 23 Mar - 11:01, édité 3 fois | |
| | | Pierre AUBREE Admin
| Sujet: MAROC Villes Impériales Mar 25 Sep - 8:49 | |
| page 7 Fès, Fondouk et fontaine Nejjarin. AVANT-PROPOS Le Maroc conserve un trésor unique : aux portes mêmes de l'Europe, ses villes anciennes poursuivent leur vie traditionnelle dans un cadre architectural qu'une vigilante admiration a su défendre dès la première heure du Protectorat. Tout un moyen âge à la fois intact et vivant se prolonge en elles. Les grandes médinas marocaines offrent ainsi un dépaysement que l'on cherche souvent en vain dans des pays plus lointains. Alors qu'en Orient les plus célèbres cités d'Islam, pour avoir voulu se moderniser en hâte et au hasard, ont ...
Dernière édition par Pierre AUBREE le Dim 23 Mar - 11:09, édité 3 fois | |
| | | Pierre AUBREE Admin
| Sujet: MAROC Villes Impériales Mar 25 Sep - 8:50 | |
| page 8 ... presque toujours perdu le meilleur de leur beauté ancienne, celles du Maroc se sont gardées de renier jamais leur passé. Les grandes capitales historiques, seules, y conservent tous les aspects et les activités de l'Islam médiéval. Les villes de la côte, qui furent presque toutes occupées au XVIe et au XVIIe siècles par les Portugais et les Espagnols, ne sont plus guère que des marchés ruraux dans des enceintes chrétiennes. Elles sont belles et curieuses, mais à d'autres titres. Les bourgades de l'intérieur sont toutes musulmanes, d'histoire et de visage; toutefois la vie proprement citadine s'y est anémiée. Ce livre se borne donc à étudier les quatre cités qui furent et qui restent des villes impériales : Fès, Marrakech, Rabat-Salé et Meknès. Par leur vie quotidienne, aussi bien que par leur architecture, elles nous gardent l'image fidèle de ce que fut la plus brillante des civilisations musulmanes : celle qui fleurit en Espagne; formée dans la Péninsule, elle commença de pénétrer les villes du Maghreb au Xe et au XIe siècles. Elle les conquit pleinement au XIIe et au XIIIe siècles, alors que des sultans marocains, Almoravides, Almohades, régnaient des deux côtés du détroit. Après la grande reconquête chrétienne du XIIIe siècle, Grenade, Fès et Tlemcen vécurent de la même existence et des mêmes traditions artistiques. La chute de Grenade, en 1492, tarit la source vive de la civilisation hispano-mauresque. Toute réfugiée au Maghreb, la tradition andalouse s'enferma entre les murs des cités, incapable de se renouveler, lentement déclinante, mais tournée avec piété et obstination vers son passé. Le Maroc eut ainsi le privilège de rester, dans ses campagnes, le grand pays berbère et, dans ses centres urbains, l'héritier de l'Espagne musulmane. La banalité croissante d'un monde uniformisé nous fait mieux sentir la valeur de cette double fidélité. Pourtant, les métropoles du Maroc où se maintient depuis des siècles une civilisation émigrée, n'ont pas toujours reflété les mêmes aspects de la tradition hispanique où se fonde leur vie. Si elles ont des visages très particuliers, fortement individualisés, c'est qu'elles s'expliquent moins encore par leur géographie que par leur histoire. Elles n'ont jamais cessé d'avoir des destins dissemblables et les ...
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| | | Pierre AUBREE Admin
| Sujet: MAROC Villes Impériales Mar 25 Sep - 8:51 | |
| page 9 Céramiques de Fès ... mêmes événements eurent souvent pour elles les conséquences les plus opposées. Pour jouir pleinement de leur complexe beauté, et même pour comprendre leur économie ou leur vie présentes, il faut connaître au moins les grandes lignes de leur passé. Qu'on veuille bien ne rechercher dans les pages qui suivent, ni des études d'histoire de l'art, ni un véritable guide monumental. La ville est considérée ici comme le monument premier et essentiel : ses édifices n'apparaissent que dans la mesure où ils éclairent quelque aspect du passé, où ils expriment quelque chose de son âme. Puisse ce livre donner à ceux qui passent, ou même à ceux qui vivent dans ce pays, une intelligence plus profonde et plus exacte des grandes cités maghrébines, et contribuer ainsi à préserver, dans la nouvelle vie du Maroc, l'ancienne et parfaite harmonie des villes qu'aimait Lyautey et qu'il voulut sauver.
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| | | Pierre AUBREE Admin
| Sujet: MAROC Villes Impériales Mar 25 Sep - 8:53 | |
| page 10 Fès. Collège Moulay Idris.
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| | | Pierre AUBREE Admin
| Sujet: MAROC Villes Impériales Mar 25 Sep - 8:55 | |
| page 11 Fès. Bab El Ahmer. Heurtoir d'une porte de la mosquée Karaouiyn. FESDepuis le moyen âge, les historiens et les géographes arabes n'ont cessé de proclamer Fès la première ville du Maghreb. Les rares voyageurs européens des temps modernes ayant pénétré au Maroc nous ont dit leur émerveillement. Aujourd'hui, notre connaissance totale de Fès ratifie ce jugement séculaire. Si Marrakech, grâce à l'énorme masse ...
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| Sujet: MAROC Villes Impériales Mar 25 Sep - 8:56 | |
| page 12 Panorama de Fès (vu des tombeaux mérinides). ... de sa population flottante, semble dépasser Fès par le nombre de ses habitants, la capitale du nord n'en reste pas moins sous presque tous les rapports, la plus grande ville du Maroc. Seule elle possède le privilège de la continuité, avec, depuis des siècles, tous les organes d'une grande place de commerce et d'une capitale politique. Aux plus mauvais jours de son histoire encore, elle a pu conserver un noyau stable de populations urbaines, et tout un ensemble de traditions. C'est Fès qui nous fait comprendre la valeur et les formes de la vie citadine au Maroc. C'est elle aussi qui nous montre le mieux, en un reflet pâli mais fidèle, ce que furent les grandes héroïnes de l'Espagne musulmane : Cordoue, Tolède et plus encore Grenade. La capitale de l'Islam marocain naquit au IXe siècle, alors que la religion musulmane avait pris pied au Maroc depuis plus de cent ans. La conquête islamique changea peu à peu seulement les conditions ...
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| | | Pierre AUBREE Admin
| Sujet: MAROC Villes Impériales Mar 25 Sep - 8:57 | |
| page 13 ... de la vie urbaine; à l'aube du IXe siècle, les grandes villes du nord sont toujours les cités romaines : Tingis (Tanger), Abila (Ceuta), Lixus, Volubilis. Mais, au cours du IXe siècle, de petites dynasties, presque toutes orientales, réalisent une première organisation musulmane. Le Maroc eut lui aussi son prince d'orient : Idris, un descendant d'Ali qui avait pris part à une révolte contre les Abbassides et pu échapper à la répression du calife de Bagdad. Idris, ayant passé à Tanger, qui restait la plus riche des villes du Maroc, arriva à Oulili, l'ancienne Volubilis, où il fut bien accueilli par la tribu berbère des Aouréba. Sa qualité de chérif, sa baraka, lui permirent de commander en 788 une coalition de tribus berbères du nord. Au nom de l'orthodoxie islamique, Idris Ier, devenu chef de guerre, tenta la conquête et l'islamisation d'autres régions du Maroc. Mais il n'eut pas le temps d'achever son œuvre : il mourut en 793, sans doute empoisonné par un émissaire du calife abbasside. Dès l'âge d'homme, son fils posthume Idris II reprit l'œuvre paternelle. Les armées idrissites, si elles ne purent réduire dans les plaines atlantiques l'état hérétique des Berghouata, soumirent le sud marocain ainsi que le pays de Tlemcen. Le royaume d'Idris II couvrit ainsi la majeure partie du Maghreb. Idris Ier était resté fidèle à la ville qui l'avait accueilli. Son fils, qui avait constitué autour de cette royauté naissante une petite cour mi-berbère, mi-orientale, voulut posséder une nouvelle capitale. Oulili, nous disent les chroniqueurs arabes, devenait trop exiguë pour contenir l'affluence qui se pressait autour du jeune et glorieux souverain. A qui connaît le vaste périmètre de Volubilis, l'assertion paraît au moins douteuse. Des raisons plus profondes expliquent la fondation de Fès. Les conquérants d'Islam marquaient presque toujours l'extension de la loi du Prophète à un nouveau pays par la fondation d'une ville qui devenait la place d'armes des milices islamiques et le foyer de l'apostolat musulman. Champion tardif — mais heureux — de l'Islam orthodoxe au Maghreb extrême, Idris II voulut sans doute renouveler le geste inaugural de ses prédécesseurs. Ce n'était pas là simple symbole ni pure magnificence; à Volubilis, où la survivance du christianisme jusqu'alors nous est attestée, Idris ...
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| | | Pierre AUBREE Admin
| Sujet: MAROC Villes Impériales Mar 25 Sep - 8:58 | |
| page 14 L'oued Fès. ... pouvait se trouver gêné par une résistance tenace des anciennes religions. Au cours de leurs conquêtes, son père et lui-même s'étaient sans cesse heurtés à des tribus juives et chrétiennes. Idris II sentit sans doute la nécessité, s'il voulait poursuivre et consolider son œuvre de conquête politique et spirituelle, d'avoir une capitale de pur Islam. Enfin, il faut noter que le royaume idrissite s'étendait vers l'est bien plus que vers l'ouest et le sud. Volubilis était en position assez excentrique. Peut-être Idris II voulut-il établir une résidence nouvelle au centre même des tribus qui formaient la coalition idrissite. Des raisons de politique locale, que les textes ne précisent pas, expliquent sans doute pour une part ce déplacement de capitale. La décision prise de fonder une ville nouvelle, il restait à fixer l'emplacement. Le choix d'Idris II semble s'être porté, sans hésiter, ...
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| | | Pierre AUBREE Admin
| Sujet: MAROC Villes Impériales Mar 25 Sep - 8:59 | |
| page 15 Fès. Bab Guissa.
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| | | Pierre AUBREE Admin
| Sujet: MAROC Villes Impériales Sam 29 Sep - 6:21 | |
| page 16 ... sur la vallée du moyen Sebou; mais le site même fut plus malaisé à déterminer. On hésitait à l'intérieur d'une aire de quelque dix kilomètres. On commença de bâtir au pied même du mont Zalagh, au nord de la ville actuelle. Une nuit de tempête, les ruisseaux descendus de la montagne ruinèrent les constructions qui sortaient de terre. Fuyant les pentes, Idris voulut s'installer au bord même du Sebou; il apprit que l'endroit était exposé aux inondations. Il fixa alors son choix sur les croupes qui dominent le ravin, où dévalent, vers le Sebou tout proche, les diverses branches de l'oued Fès. La pente assez forte du terrain protégeait des inondations et le site était véritablement exceptionnel. L'oued Fès, alimenté par des sources vauclusiennes, fournit sans excès comme sans défaut une eau douce et claire. La rivière, divisée en plusieurs branches dès son entrée dans la ville, s'étale en un réseau complexe de menues dérivations, se grossit de plusieurs sources, se rassemble enfin au nord-est de la cité, avant d'aller se jeter dans le Sebou. L'eau, surtout dans les quartiers nord, peut ainsi ruisseler partout, alimenter jour et nuit chaque maison, chaque jardin. M. E.-F. Gautier a vu, dans Fès, « un miracle d'adaptation à l'état oriental ». Fès pouvait se passer d'un gouvernement stable et respecté, capable de protéger les longs et fragiles aqueducs qui sont nécessaires à la vie d'une grande cité; elle a pu vivre avec la guerre ou la révolte sous ses murs. On ne peut nier que l'abondance des eaux fit choisir son emplacement. Mais, hors Fès et Damas, la plupart des villes musulmanes n'ont pu se passer d'aqueducs, et elles se sont montrées capables de les entretenir, malgré les guerres ou les invasions. Les travaux hydrauliques comptent même parmi les grandes œuvres des dynasties musulmanes. Ainsi la survie comme la naissance de Fès ont eu d'autres raisons que la tranquille pérennité de sa rivière. Le site offrait bien d'autres avantages. Il était alors beaucoup plus boisé qu'aujourd'hui. Le sol même fournissait en quantité la pierre calcaire et l'argile. La contrée était fertile : les plateaux au sud, le pays de Sebou, la plaine du Saïs, comptent toujours parmi les plus riches régions du Maroc. Les pentes irriguées où Idris allait ...
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| | | Pierre AUBREE Admin
| Sujet: MAROC Villes Impériales Sam 29 Sep - 6:23 | |
| page 17 ... bâtir sa capitale portaient déjà de beaux jardins. Autour de cette conque verdoyante, un peu marécageuse, couverte de roseaux dans ses parties basses, se rassemblait tout ce qu'il fallait pour bâtir et pour vivre. Fès est enfin admirablement placée comme centre économique, et poste de commandement du Nord marocain. Elle est bâtie au pied des dernières rides montagneuses du Rif et au début des plateaux qui montent vers les masses puissantes du Moyen Atlas; au contact du Maroc du nord, comme du Maroc central. A l'extrémité ouest du couloir de vallées, dont Taza garde l'entrée orientale, Fès voit, à son couchant, s'ouvrir les plaines du Maroc Atlantique. Les paysages variés qui se partagent son horizon; le ressaut vigoureux du Zalagh, les croupes du Sebou, l'étagement des plateaux de Bahlil et de Sefrou, la large ouverture de la plaine du Saïs expriment ces grandes réalités géographiques. Fès n'est pas établie au cœur d'un pays homogène dont elle serait le centre naturel et comme l'émanation : elle est située au croisement des plus grandes routes du Maghreb ; celles qui vont d'Algérie au Maroc Atlantique, celles qui s'insinuent à travers les massifs du Rif et du Jbel vers la côte méditerranéenne et vers l'Espagne, celles enfin qui, par les cols du Moyen Atlas, mènent au Tafilalet et au désert. Elle est aussi à un carrefour de régions historiques et de races : entre deux grands groupes de populations berbères, les Rifains et les Bérabers, mais au débouché d'un couloir qui fut de tous temps balayé par les invasions. Endroit de contact et de carrefour, elle était ainsi destinée à rester à demi-étrangère aux pays divers qui l'entouraient et sur lesquels allait rayonner son influence. Idris II ne pouvait ni comprendre tous les avantages du lieu qu'il choisissait, ni prévoir le brillant avenir de sa création. A vrai dire, le site était trop beau pour n'avoir pas déjà tenté les hommes : au nord, près de Bab Guissa, on a retrouvé des tombes antérieures à l'Islam. Mais il fallut, pour transformer en réalités toutes les possibilités du lieu, la volonté d'un homme et une longue suite de circonstances particulièrement favorables.
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| | | Pierre AUBREE Admin
| Sujet: MAROC Villes Impériales Sam 29 Sep - 6:24 | |
| page 18 Fès. Rue descendant vers l'oued Fès La Fès primitive fut à la taille de cette dynastie des Idrissides qui ne fit qu'ébaucher une grande œuvre. Au moins Idris II fit-il preuve de bon sens en ne visant pas au grandiose; aux siècles suivants, tous les bâtisseurs marocains n'auront pas la même modération. La cité d'Idris II fut double, ou plutôt il fonda, à un an d'intervalle, deux villes; en 808, le quartier des Kairouanais sur la rive gauche de l'oued ; en 809, le quartier des Andalous, sur la rive droite. Chacun eut son enceinte particulière ; les berges mêmes de la rivière formaient une sorte de zone neutre. Le quartier sud était enfermé dans un quadrilatère de six cents mètres de côté ; le quartier ...
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| | | Pierre AUBREE Admin
| Sujet: MAROC Villes Impériales Sam 29 Sep - 6:26 | |
| page 19 Rue à Fès Bali.
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| | | Pierre AUBREE Admin
| Sujet: MAROC Villes Impériales Sam 29 Sep - 6:27 | |
| page 20 ... nord, dès l'origine plus important, formait un polygone irrégulier d'environ un kilomètre de long sur cinq cents mètres de large. Pourquoi ces deux fondations d'un même homme, dans le même temps, sur les deux rives d'une même rivière ? C'est là sans doute une très vieille tradition berbère : la localité berbère fut souvent comme elle est restée maintes fois une simple juxtaposition de villages, une sorte de ville-archipel. Aujourd'hui encore, bien des villages du Sud marocain ne sont que des réunions de hameaux, comme les villes sahariennes ne sont que des collections de ksour. La primitive Meknès, fondée par la confédération des Miknassa — et non par une dynastie — était et demeura longtemps composée de trois agglomérations différentes. En général, chaque quartier de ces cités multiples abritait une tribu distincte. Cette ville-archipel est bien la formation la plus naturelle dans un pays où l'unité sociale est à la fois très petite et très solide. Les villes homogènes étrangères au monde des tribus, seront au Maroc des créations de la civilisation musulmane et non pas de la civilisation berbère. Par un trait au moins, Fès était déjà extérieure à la tradition berbère. Chacun de ses secteurs était entouré d'une muraille continue, qu'Idris avait lui-même tracée sur le terrain, et dont les portes allaient prendre des noms à la mode musulmane. Cette dualité de la Fès primitive eut sans doute des raisons sociales et politiques. Dans la partie qui s'appela un peu plus tard le quartier des Kairouanais, s'installèrent surtout les Arabes, venus de Tunisie ou d'Espagne, qu'Idris II avait rassemblés autour de lui. Dans le quartier des Andalous se logèrent des éléments berbères appartenant aux diverses tribus qui formaient la coalition idrissite. Fès était donc une expression assez exacte de la politique d'Idris II : la première place était déjà donnée à un makhzen arabe; mais la dynastie idrisside ne pouvait se détacher encore des tribus berbères qui l'avaient instaurée et qui faisaient sa force. Fondée par un oriental entouré d'Arabes, Fès allait s'enrichir bientôt d'autres éléments étrangers. En 814, arrivèrent huit cents familles andalouses, venues presque toutes du faubourg de Cordoue, l'antique Secunda qui s'était révoltée contre l'émir omeiyade ...
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| | | Pierre AUBREE Admin
| Sujet: MAROC Villes Impériales Sam 29 Sep - 6:28 | |
| page 21 ... El Hakem Ier. Une rébellion kairouanaise amena peu après trois cents familles de la plus grande ville musulmane de l'Afrique du Nord. On peut croire qu'au milieu de cet amalgame de Berbères et d'Arabes, ce furent les Espagnols et les Ifrikiyens qui furent à l'origine des traditions urbaines de Fès. La cité d'Idris commençait donc à vivre sous le signe des deux villes qui devenaient les pôles de l'Islam occidental et qui, successivement, allaient lui fournir les éléments de sa civilisation : Kairouan, Cordoue. A ces exilés, Fès dut apparaître comme une bourgade bien rurale indigne d'être comparée aux grands centres qu'ils venaient de quitter. Au milieu des deux enceintes d'Idris II, ne s'élevèrent d'abord que des maisons de pisé sans étage, qui s'entouraient de jardins. D'autres vergers s'étendaient au dehors en direction du Sebou. Dans chaque quartier, un sanctuaire très modeste : la mosquée des Chorfa, chez les Kairouanais; la mosquée des Cheikhs, chez les Andalous. La Fès primitive ne consistait donc qu'en deux grandes kasbas, munie chacune d'une mosquée et qui, peu à peu, se remplissaient de maisons et de jardins. Bien d'autres villes allaient se fonder au IXe et au Xe siècles dans le nord du Maroc. Au lendemain de la mort d'Idris II, son royaume se morcellera et ce sera un confus défilé de principicules. Tous les chefs qui vont tenter de se tailler un royaume, toutes les tribus miknas-siennes ou zénètes qui, venues de l'est, envahirent le Nord marocain, fonderont à l'envi des métropoles nouvelles. Souvent même ces dominations éphémères auront deux points d'appui : une ville de plaine et une forteresse-refuge en montagne. Quelques-unes de ces places, après des débuts modestes réussiront à survivre, comme Meknès et Taza. Presque toutes les autres : Basra, Maisena, Djeraoua, disparaîtront après quelques années, ou quelques dizaines d'années, de prospérité. Après avoir si longtemps gardé ses anciennes cités romaines, le Nord marocain, sous l'action des dynasties musulmanes, est saisi d'une sorte de fièvre et multiplie au hasard ses villes. Mais Fès ne fut pas emportée dans ce tourbillon de créations éphémères. Les vicissitudes de l'histoire semblèrent se conjurer pour assurer sa stabilité et sa fortune, au milieu des troubles où naissaient et ...
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| | | Pierre AUBREE Admin
| Sujet: MAROC Villes Impériales Sam 29 Sep - 6:29 | |
| page 22 Fès. Patio d'une maison moderne. ... disparaissaient ses rivales d'un moment.
Cette ville neuve, faite pour être la capitale d'un royaume qui devait, dans la pensée de ses fondateurs, comprendre tout l'ouest de la Berbérie, ne réalisa leurs desseins que très lentement. L'unité du royaume idrissite ne survécut pas à Idris II. Mais dans le partage qui se produisit alors, l'émir de Fès garda une sorte de prééminence sur ses frères. Aux émirs de la branche aînée finirent par succéder des émirs d'une branche cadette, les Idrissides du Rif, solidement appuyés sur tout un bloc de populations montagnardes. A plusieurs reprises, les dynasties sanhajiennes d'Ifrikiya, Fatimides, Zirides et Hammadides lancèrent des expéditions qui mirent pour quelques années sous leur autorité la grande ville du nord. Surtout Fès devint le foyer de deux grands groupes de tribus zénètes, les Béni Ifren et les Maghraoua, qui envahirent et dominèrent en partie le Maroc. Mais si elle est alors la proie qu'on ...
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| | | Pierre AUBREE Admin
| Sujet: MAROC Villes Impériales Sam 29 Sep - 6:31 | |
| page 23 Fès. Mosquée des Andalous. La porte Nord élevée par Mohammed En Nacer. Début du XIIIe siècle.
Dernière édition par Pierre AUBREE le Lun 24 Mar - 8:19, édité 1 fois | |
| | | Pierre AUBREE Admin
| Sujet: MAROC Villes Impériales Sam 29 Sep - 6:32 | |
| Veuillez patienter le temps du téléchargement des fichiers photo page 24 ... se dispute, elle est plus encore le refuge auquel on s'attache. Et sous ses maîtres divers, la bourgade à demi-rurale d'Idris II devient un véritable centre urbain. A vrai dire, les deux quartiers primitifs se remplirent bien plus qu'ils ne s'agrandirent. Toutefois, du côté de l'oued s'étaient constitués des faubourgs qu'un émir zénète couvrit d'un mur. Mais les deux agglomérations restaient distinctes et souvent ennemies. Les deux fils de l'émir zénète Dounas, Fetouh et Adjisa, furent en lutte ouverte : chacun d'eux se bâtit une kasba dans la partie haute : Bab Fetouh et Bab Guissa gardent encore le souvenir de cette lointaine et fraternelle rivalité. La haine, quasi géographique des rivales bâties sur les deux bords d'une même rivière, se manifestait sous d'autres aspects encore. A des dates traditionnelles, les jeunes gens des deux quartiers allaient se battre sur un éperon au bord de l'oued : le tertre aux Fèves. Ces mœurs villageoises nous en disent long sur la simplicité de la Fès primitive. Toutefois les deux agglomérations jumelles changeaient de caractère. Dès le temps des Idrissides, s'étaient élevées deux nouvelles mosquées : la mosquée de Fatima, qui forma le noyau de l'actuelle Karaouiyn et la mosquée des Andalous. Comme ces nouveaux sanctuaires, d'ailleurs modestes, étaient plus vastes que les primitifs oratoires, on y transféra la khotba ; ils furent ainsi élevés à la dignité de mosquées-cathédrales. Sous les Zénètes, on construisit dans les deux quartiers dès lors à peu près remplis de maisons, toute une série de bains. Au Xe siècle, Fès apparaît munie de tous les organes urbains à la mode musulmane d'Orient ou d'Espagne. Dans la première moitié du IXe siècle, c'est surtout de Kairouan que Fès reçoit les prémices de sa civilisation. Mais Cordoue, sous Abder Rahman II, commence de prendre son essor. Plus proche que Kairouan, elle ne tardera pas à exercer sur Fès un attrait irrésistible. Et au Xe siècle, au moment où la civilisation omeiyade d'Espagne devient la plus brillante de tout l'Islam, une même crainte et une commune haine des Fatimides rapprochent les émirs zénètes de Fès et les califes de Cordoue. Pendant toute la belle époque du califat et ...
Dernière édition par Pierre AUBREE le Mer 4 Fév - 8:31, édité 2 fois | |
| | | Pierre AUBREE Admin
| Sujet: MAROC Villes Impériales Sam 29 Sep - 6:33 | |
| page 25 ... sous les Amirides, Cordoue exerce un véritable protectorat sur le nord du Maroc. C'est par ordre du calife Abder Rahman III que la mosquée d'El Karaouiyn est agrandie et munie, en 955, du minaret qui la domine aujourd'hui encore. Ce minaret, doyen de tous les monuments de Fès, est comme les minarets omeiyades d'Espagne, une tour carrée de moyennes dimensions, bâtie en pierre de taille. Mais il se couvre d'une coupole large et basse qui rappelle certains dômes tunisiens du IXe siècle. Si les baies géminées de sa partie supérieure sont d'expression toute andalouse, la baie inférieure de sa face méridionale, d'un dessin si curieux, vient manifestement de l'art abbasside. Ainsi, dans la Fès du Xe siècle, les leçons de l'Orient se mêlaient encore largement à l'influence désormais prépondérante de l'Espagne. Des émirs zénètes dotèrent également la mosquée des Andalous d'une tour de même forme, mais plus modeste et sans décor. Les minarets jumeaux des deux grandes mosquées, quelques restes du rempart oriental du quartier des Kairouanais, sont les seuls vestiges archéologiques de la lointaine époque où Fès Bali était double. Au Xe siècle, en même temps qu'elle s'ouvre largement aux influences extérieures, la ville commence d'agir sur le pays. Tout autour d'elle, le long des pistes qui vont vers l'Espagne et jusque dans la montagne soumise à ses émirs, le berbère recule devant l'arabe : c'est par le rayonnement de Fès et de l'Espagne que se sont constitués les parlers arabes anciens du Maroc. Centre d'arabisation, c'est aussi un centre d'islamisation : sous les Idrissides et sous les Zénètes, le kharedjisme recule; Fès qui diffusait dans le monde des tribus le malékisme venu de Cordoue comme de Kairouan, a été, dans le Maroc du IXe et du Xe siècles, la grande missionnaire de l'orthodoxie. Sur le plan religieux, elle réalisait pleinement la pensée de son fondateur. Toutefois, si elle apparaissait déjà comme la métropole religieuse et culturelle du Maroc tout entier, elle n'était encore que la capitale économique du Nord marocain. Les dynasties qui la prenaient comme résidence manquaient de force pour étendre son rayonnement. Or, au XIe et au XIIe siècles, le Maroc passe au premier plan de l'histoire de la Berbérie. Il devient le berceau des deux plus ...
Dernière édition par Pierre AUBREE le Lun 24 Mar - 16:08, édité 1 fois | |
| | | Pierre AUBREE Admin
| Sujet: MAROC Villes Impériales Sam 29 Sep - 6:34 | |
| page 26 Grande rue de Fès Jdid. ... grands empires que l'Occident musulman ait connu : celui des Almoravides et celui des Almohades. A ne considérer que l'histoire politique, Fès aurait dû subir alors une sorte d'éclipse : Almoravides et Almohades s'appuyaient sur le sud du Maroc et la capitale des deux empires fut Marrakech. Or, les premières relations de Fès avec ces deux dynasties furent franchement mauvaises. Les Almoravides durent à deux reprises assiéger et prendre la ville; chaque fois leur difficile victoire fut suivie d'un grand massacre de Zénètes. A leur tour, les Almoravides la défendirent énergiquement contre les Almohades. Abd el Moumen infligea là le traitement qu'il appliqua plusieurs fois au Maghreb. Il détruisit une partie des murs en même temps qu'il ravageait la kasba. Ce ne furent que brouilles passagères. Les sultans de Marrakech ...
Dernière édition par Pierre AUBREE le Lun 24 Mar - 16:11, édité 2 fois | |
| | | Pierre AUBREE Admin
| Sujet: MAROC Villes Impériales Sam 29 Sep - 6:36 | |
| page 27 Fès. Mosquée Karaouiyn. Minaret zénète (Xe siècle) et pavillon saadien (XVIe siècle). ... avaient besoin de Fès pour tenir le Nord marocain; elle était surtout un indispensable relai vers l'Espagne. Ceux qui importaient dans leurs états la civilisation hispano-mauresque ne pouvaient tenir longtemps rigueur à la cité qui la représentait déjà au Maroc. Le fondateur même de l'empire almoravide, Yousef ben Tachfin, s'occupe de Fès avec sollicitude et ordonne d'y bâtir des mosquées et des bains ; au nord de l'agglomération commerçante, il fait construire une kasba de commandement : celle de Bou Jeloud dotée d'une mosquée, Il fait plus : il met fin à la ...
Dernière édition par Pierre AUBREE le Lun 24 Mar - 16:14, édité 2 fois | |
| | | Pierre AUBREE Admin
| Sujet: MAROC Villes Impériales Sam 29 Sep - 6:37 | |
| page 28 ... dualité de la ville en réunissant dans une seule enceinte les deux quartiers anciens et leurs faubourgs; et pour supprimer les absurdes rivalités des Kairouanais et des Andalous, on abattit les murailles longeant les rives de l'oued. Abd el Moumen fit démanteler cette enceinte unique; mais le quatrième calife almohade, Mohammed En Nacer la fit rebâtir plus vaste et lui adjoignit une nouvelle kasba. La muraille qui entoure aujourd'hui Fès Bali conserve le tracé, avec de nombreux vestiges, de cette enceinte almohade. Bab Guissa reste le meilleur exemple des portes monumentales qui furent construites. Fès était dès lors la plus grande place de commerce du Maroc. Si elle n'avait pas rang de capitale politique, elle n'en connut pas moins au XIIe siècle et au début du XIIIe, une prospérité inouïe. Tous les textes sont formels à cet égard. Dans les relations très actives que le Maroc d'alors entretenait avec l'Espagne, notre ville jouait un rôle de premier plan. Et devant son négoce, c'était tout un empire qui s'ouvrait : elle fut sans doute, dès cette époque, le grand centre distributeur des marchandises importées d'Espagne ou d'Orient. Ses propres ateliers commençaient à s'organiser sur le modèle de ceux d'Espagne. Fès Bali acquit alors sa forme définitive; son réseau de rues prit, auXIIe siècle, les grandes lignes de son dessin actuel. En même temps, il s'enrichissait de monuments qui restent les plus imposants de la ville. Ce fut sous le second sultan almoravide, Ali ben Yousef, que la Karaouiyn fut agrandie à ses dimensions actuelles. Cet édifice est donc, à l'exception de son minaret zénète et des pavillons saadiens qui ornent les petits côtés de sa cour, une mosquée almoravide; l'un des plus beaux sanctuaires de l'Afrique du Nord. Si la subtile élégance de son mihrab, la richesse ordonnée de ses plafonds à stalactites, les délicates marqueteries et les panneaux floraux, ciselés comme des bijoux, de son minbar échappent encore aux yeux des Européens, il est possible, en s'attardant dans les ruelles obscures qui bordent l'antique mosquée, de sentir toute la beauté de l'œuvre que réalisèrent, pour des sultans venus du désert, les maîtres d'œuvre et les artistes d'Andalousie. Ce sont les portes aux battants couverts de cuivre ...
Dernière édition par Pierre AUBREE le Lun 24 Mar - 16:18, édité 1 fois | |
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