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| LYAUTEY L'AFRICAIN | |
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Auteur | Message |
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Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Sam 8 Nov - 9:16 | |
| 11 NOVEMBRE 1918. - RABAT Photo Flandrin, Casablanca 3 MARS 1919.- Photo Cie Schneider Le Général Lyautey annonce l'armistice...
Pose de la 1001° pierre de la grande jetée de Casablanca | |
| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Sam 8 Nov - 9:23 | |
| Lyautey a un faible pour le médecin, dont l'action, comprise comme une mission et un apostolat, ennoblit et justifie à ses yeux l'expansion coloniale. Par suite, prestigieux animateur de l'œuvre médicale sous toutes ses formes, il s'intéresse vivement aux questions d'hygiène sociale et à la protection sanitaire des collectivités, considérant comme une véritable nécessité de travailler au développement de la race marocaine aussi bien que de s'attacher nos nouveaux sujets, déclarant que « une infirmerie indigène vaut un régiment » et qu'il tient de la manière la plus expresse à cet excellent moyen de pénétration pacifique. Mais des femmes, de la mère, de l'enfant, qui va donc s'occuper ? Ce milieu, qui vit dans l'insouciance de l'hygiène féminine et infantile, est très fermé dans le monde musulman et il est difficile de pénétrer dans son intimité. C'est là cependant que Madame Lyautey, si pitoyable aux déshérités de la vie, au cœur ardent comme celui du général, va consacrer son activité, en créant toutes les œuvres protectrices connues : maternités, gouttes de lait, crèches, pouponnières, centres de puériculture, orphelinats, jardins de soleil. On la trouve dans tout le Maroc, ne ménageant ni son temps ni sa peine. Œuvres des mères, œuvres de l'enfance, tout est à créer. Pour réussir, il faut être patient et savoir combattre les préjugés enracinés : c'est le mérite de Madame Lyautey d'avoir compris le milieu indigène et supérieurement organisé ses œuvres. Aussi, que de misères secourues, que de maladies soignées, que d'enfants conservés à leurs parents, que de vies sauvées par ses soins et, en retour, combien de reconnaissances sont montées vers elle, noble servante de la cause française ! Les plus grands maîtres de la médecine lui ont apporté leurs félicitations, auxquelles se sont joints le Sultan en lui décernant la médaille du Mérite Chérifien, et le Gouvernement français en lui donnant la croix de la Légion d'Honneur avec cette citation : « Titres exceptionnels : a tendu des services exceptionnels à l'armée et au service de santé en organisant des œuvres nombreuses qui ont exercé leur action bienfaisante au Maroc comme aux armées. Pour animer ces œuvres, s'est multipliée pour aller partout au Maroc, en France ou au front. S'est toujours et partout distinguée par son mépris des fatigues et du danger, par son inlassable dévouement et son inépuisable bonté. »
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| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Sam 8 Nov - 9:27 | |
| 12 JUILLET 1921. Photo Flandrin, Casablanca. Un comité s'est constitué au Maroc pour offrir au Maréchal, au nom du Maroc, un bâton ciselé par Falize. | |
| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Sam 8 Nov - 9:32 | |
| C'est qu'en effet, Madame Lyautey n'a pas borné son zèle aux familles indigènes. Vice-présidente de la Société de Secours aux blessés militaires et présidente des Œuvres de guerre au Maroc, elle a aussi donné assistance aux troupes marocaines sur les divers fronts, s'ingéniant à créer et diriger des sociétés de Croix-Rouge et des maisons de convalescence, organisant des œuvres adaptées aux nécessités de la guerre, tout surgissant de terre à son commandement et fonctionnant à la perfection. Les civils, de leur côté, ne sont pas oubliés. Les sociétés de bienfaisance, cantines scolaires, garderies, ouvroirs reçoivent d'elle leur animation, de même qu'elle met sur pied l'œuvre des colonies de vacances pour enfants délicats et anémiés. On ne s'étonnera pas, après cela, que le nom de Madame la maréchale Lyautey, si populaire au Maroc, y soit resté synonyme de bonté et de dévouement, et l'on comprendra que le pays s'associe aux paroles prononcées à Nancy, en août 1934, par le maréchal Pétain, devant le cercueil de Lyautey : « Dans les devoirs que lui imposaient ses hautes charges et ses amitiés illustres, vous avez contribué, Madame la Maréchale, à entretenir l'éclat et le charme de sa maison. Par votre inépuisable charité, vous avez pris votre part dans cette conquête des cœurs qu'au long de sa carrière il n'a cessé de poursuivre. Votre haute distinction et votre inlassable dévouement demeureront inséparables de son œuvre. » A ce tribut d'hommages, qu'il nous soit permis d'ajouter qu'au Maroc on conservera longtemps le souvenir d'un grand Français et d'une bonne Française qui se sont si bien complétés dans l'éblouissement d'une activité débordante, pour assurer, chacun dans sa sphère et à sa façon, la paix française dans le cadre marocain. En décembre 1916, Lyautey, appelé par Briand pour être ministre de la Guerre, quitte le Maroc. Aucun Français ne se réjouit de l'événement, craignant que son rôle marocain, qu'il tient si brillamment, ne soit trop tôt terminé. 46 | |
| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Sam 8 Nov - 9:38 | |
| 14 JUILLET 1921. - RABAT Photo Flandrin, Casablanca Le Général Lyautey passe en revue les troupes de la garnison, sur le boulevard El-Alou. | |
| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Sam 8 Nov - 9:43 | |
| Le général lui-même part à regret, bien qu'il laisse la place à un ami sûr, le général Gouraud; il voit qu'il laisse une œuvre inachevée et pressent un avenir inquiétant dans le Sud, où l'aide allemande apportée à El Hiba laisse planer sur les ports marocains de lourdes menaces. Il n'accepte d'ailleurs de prendre le ministère que pour servir son pays et dans la pensée qu'il pourra être un animateur, comme aux colonies. Hélas ! il n'est pas long à revenir de son erreur. Le milieu n'est plus le même et lui n'est plus lui-même. Il se sent impuissant et noyé dans la masse parlementaire, qui ne partage pas sa conception de la responsabilité et du commandement. Précurseur de la politique énergique de Clemenceau, il effraie les Chambres, heurte leurs habitudes et inspire de la méfiance, parce que c'est un grand chef militaire. Au bout de trois mois, il en a assez et donne sa démission, dans les circonstances que l'on connaît, en mars 1917. Peu de temps après, on le revoit avec plaisir au Maroc. * **
II n'y a pas lieu de s'arrêter à cet intermède, qui fut plutôt un accident dans sa carrière coloniale et que l'on marque ici simplement pour mémoire. Il est heureux qu'à l'Armistice il se trouve à son ancienne place, car au Maroc la guerre continue, bien que les espoirs marocains de l'Allemagne soient ruinés pour un long temps, espérons-le. Le général le fait pressentir aux troupes dans une de ses allocutions : « Votre tâche n'est pas finie. Ici notre adversaire n'a pas désarmé. Ignorant des choses d'Europe, aveuglé par les excitations qu'il a subies depuis quatre ans, il ne se rend pas compte encore que le sort a décidé, et que rien, dans l'avenir, ne pourra échapper à notre force dégagée de toute entrave. Plus que jamais, il s'agit de lui tenir tête. » Lyautey n'oublie pas, en parlant ainsi, que dans le conflit mondial le Maroc a été le premier enjeu de nos ennemis : Tanger, Casablanca, Agadir portent des noms historiques par suite de certaines manifestations allemandes qu'aucun Français ne peut ignorer. 47
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| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Sam 8 Nov - 9:52 | |
| AU PRINTEMPS 1919 Photo de Mazières El Hadj Thami Ben Mohamed el Mezouari Glaoui est élevé à la dignite de grand-officier de la Légion d'Honneur, après une heureuse diversion au sud de l'Atlas, à la tête de 10.000 hommes. Le Général Lyautey lui remet la décoration en présence des troupes à Marrakech. | |
| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Sam 8 Nov - 9:59 | |
| Aussi le général est-il aux aguets plus que jamais, son expérience nord-africaine lui donnant à se méfier, au surplus, de ces indigènes ambitieux et de ces faux prophètes qui surgissent de façon spontanée en pays musulman et peuvent, dans un élan de fanatisme, détruire par surprise l'œuvre la plus solide. Lyautey cherche donc à se protéger et, à cette fin, cherche la réduction de la zone insoumise de l'Atlas, disant dans son langage imagé qu'il veut donner au Maroc « une colonne vertébrale » pour pouvoir ensuite lui « bâtir des côtes ». Il atteint son but en deux années. Déjà en 1917, les troupes du général Aubert avaient opéré avec succès dans la région de Taza, mais la résistance d'Abdel Malek et de Moha ou Saïd est tenace, et ceux-ci, pourvus d'argent allemand, essaient de couper les routes impériales de Fès à Taza et de Meknès au Tafilelt. De 1918 à 1920, les généraux Doury et Poeymirau, l'un par la Moulouya, l'autre par Meknès, parviennent à soumettre les tribus berbères en traversant l'Atlas et à rejeter dans le Sud le Semlali, prêcheur de guerre sainte, qui, toujours à l'instigation de l'Allemagne, croyait devoir faire des exploits avec sa harka. A peine est-il tranquille de ce côté, que le général Gouraud doit se porter dans le Nord, où Poeymirau occupe Ouezzane. Le Rif commence à s'agiter sérieusement, mais que faire ? Nous n'avons pas d'hommes et pas de coopération à espérer de l'Espagne, qui, du reste, subit à Melilla, en 1921, un désastre sans précédent. On attendra des jours meilleurs pour réduire ce foyer d'incendie. Pour l'instant, il n'y a qu'à continuer l'application méthodique du plan arrêté dès le début, en rétrécissant le cercle autour des dissidents qui peu à peu, fraction par fraction, se soumettent à notre autorité. Nos généraux liquident dans le moyen Atlas, le Tadla et la « tache de Taza » les problèmes Béni Ouaraïn, Zaian et autres, si bien qu'on peut alors entrevoir, à brève échéance, la pacification complète, dans le minimum de temps et avec le minimum d'effectifs, et ininterrompue malgré les heures tragiques de la Grande Guerre. Dans l'intervalle, le Maroc a été en liesse à l'annonce de deux bonnes nouvelles concernant son illustre chef : d'une part, en 1920, sa réception à l'Académie Française, d'autre part, en 1921, sa nomination de Maréchal de France. 48
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| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Sam 15 Nov - 16:30 | |
| 1921. - Rabat Cliché communiqué par M. de Senailhac. Le Maréchal revenant d'une promenade au Chellah. | |
| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Jeu 20 Nov - 18:14 | |
| Bien qu'élu depuis le 31 octobre 1912 en remplacement de Henry Houssaye, le général, par suite des circonstances, dut attendre le 8 juillet 1920 pour prendre possession de son fauteuil. C'était un retard heureux : la fête ne fut, en effet, que plus grande chez nos Immortels, fête littéraire bien entendu, mais aussi fête de l'expansion coloniale, car, en ce mémorable jour, Lyautey a bien garde d'oublier l'armée coloniale, « cette armée de parents pauvres » dont on méconnaît trop la rude vie. Le nouvel académicien ne lui ménage pas ses éloges et profite de ce qu'il glorifie les coloniaux pour évoquer la mémoire de deux de ses amis très chers : Eugène-Melchior de Vogue, ce « voyant » qui avait pressenti, dans sa clairvoyance patriotique, « les ressources inappréciables que pourrait nous offrir notre empire colonial », et Gallieni, que son « plus haut titre d'honneur est d'avoir eu comme chef et comme ami ». Il termine son discours par un couplet à la gloire du petit soldat de France qu'avait si bien compris Albert de Mun et rappelle la phrase de Henry Houssaye : « Ah oui ! la Grèce, mais voyez-vous, mon ami, la grande beauté, savez-vous où on la trouve ? C'est dans l'âme d'un soldat, d'un soldat qui, avec un sou par jour, se fait casser la tête pour la France. » Monseigneur Duchesne a la partie belle pour retracer la brillante carrière de Lyautey. « Quelle splendide carrière, s'écrie-t'il, quelle régularité dans votre ascension ! Au début, l'attente, l'âme tendue vers l'action en des désirs intenses, aiguisés, exaspérés par la placidité des garnisons, enfin assouvis au Tonkin, plus encore à Madagascar. Puis, comme si une Providence spéciale vous conduisait par la main, votre installation dans l'Ouest algérien, d'où vous voyez votre Maroc et intervenez déjà dans ses affaires, enfin la mission à vous confiée par le Gouvernement de la République, la mission de faire valoir la protection française dans l'empire chérifien... Vous tenez l'objet de vos rêves. » Et Monseigneur Duchesne de se demander si les bonnes fées de Lorraine n'ont pas prophétisé qu'il serait roi, « mais le fait est que vous avez, sans le titre, la réalité du pouvoir souverain et du souverain fondateur d'empire. Que vous êtes là-bas, pour vous citer à vous-même, celui dans les yeux duquel les milliers d'yeux cherchent l'ordre, celui à la voix duquel des routes se rouvrent, des pays se repeuplent, des villages surgissent. » 49 | |
| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Jeu 20 Nov - 18:19 | |
| VISITES PRINCIERES Octobre 1921. Photos Flandrin Le Maréchal Lyautey et ses hôtes royaux belges.
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| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Jeu 20 Nov - 18:24 | |
| VISITES PRINCIERES
Octobre 1921. - Photo Flandrin, Casablanca. Rabat, 1925. - Photo Chabance, Rabat | |
| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Ven 21 Nov - 5:38 | |
| Puis c'est l'éloge de l'œuvre, associée au chef du Maroc, qui, malgré l'inclémence du temps, non seulement a gardé le sourire comme l'exigeait la consigne, mais connaît une magnifique prospérité et voit s'ouvrir devant lui les plus rassurantes perspectives. « Toute cette vie est par vous sortie du tombeau : c'est sous votre main qu'elle s'épanouit, qu'elle fructifie. Tant qu'il y aura un Maroc français, on y célébrera le nom du général Lyautey. » Eh non, Monseigneur, ici vous vous trompez. Ce que le Maroc célèbre, c'est le nom du maréchal Lyautey, car, depuis votre discours, le Gouvernement a conféré le maréchalat, par décret du 19 février 1921, au chef militaire, au pacificateur et à l'organisateur de l'empire chérifien. Le rapport qui précède ce décret a la valeur d'une véritable citation : le lecteur la trouvera plus loin. Disons seulement que c'est en débarquant à Marseille, venant du Maroc, que le général lit la dépêche Havas qui lui apprend l'heureuse nouvelle. II garde néanmoins pour lui ses impressions, poursuit son travail et, le soir, pour se reposer de sa journée qui a été un peu chargée, il se fait conduire chez un antiquaire. N'est-ce pas là du pur Lyautey, tel qu'il se dévoile dans ses Lettres du Tonkin et de Madagascar. La scène ne rappelle-t-elle pas des scènes de l'antiquité du même genre ? Tant de maîtrise de soi-même ne trompe pas le Maroc qui, sachant tout ce qu'il doit à son sauveur, lui fait fête à son retour de France, et lui offre, par l'entremise de Messieurs Bernaudat et Philip, son bâton de maréchal gagné dans les conditions que rappelait le décret gouvernemental : « En maintenant, par le décret du 29 octobre 1919, le général de division Lyautey en activité hors cadres, l'un de vos prédécesseurs consacrait, au nom du pays, les services éclatants et continus rendus par cet officier général. Il lui donnait en même temps la possibilité de mener à bien l'œuvre de pacification et d'organisation que, nommé dans une heure tragique, il avait si heureusement poursuivie. Le général Lyautey n'a pas cessé, depuis, de justifier cette confiance. Ses incomparables qualités de chef, déployées au milieu des plus graves difficultés, son sens de l'action, son autorité, sa méthode et ses succès ont fait de lui un des meilleurs artisans de la gloire française.
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| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Ven 21 Nov - 5:44 | |
| 1921.- Marrakech Photo Félix, Marrakech. Le Maréchal décore le caïd El Ayadi dans la cour d'honneur de la Bahia. | |
| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Ven 21 Nov - 5:55 | |
| Il a gagné, dans tous les domaines, la bataille du Maroc, qu'il a conservé à la France et à la civilisation. Le Conseil des ministres a estimé que ces titres exceptionnels devaient lui valoir la plus haute dignité militaire. »
Ce bâton n'est malheureusement pas magique et ne peut pas à lui seul terminer les rudes campagnes qui assureront la pacification entière et définitive du pays. Le maréchal Lyautey le répète sous cette forme aux civils et aux militaires : « Quelle que soit l'œuvre réalisée, elle n'est rien à côté de ce qui reste à faire pour assurer à ce Maroc français, dans tous les ordres, un outillage approprié à ses ressources inappréciables. » Et il exalte les courages d'un coup de clairon : « Comme le bon soldat chez qui il faut toujours chercher la leçon du dévouement sans limites, rechargeons nos sacs sans même nous demander s'ils pèsent un peu aux épaules, avec allégresse, avec ce sourire joyeux, confiant et audacieux qui est la clef de tout succès. En avant ! pour le Maroc et pour la France ! » Ainsi, le grand chef, plein d'allant, malgré ses soixante-sept ans et une longue vie coloniale bien remplie, sait soutenir le moral de tous. Sa confiance dans l'avenir reste inébranlable, son grand caractère anime la résistance, son activité sert d'exemple. Comment serait-on fatigué quand on le voit aller par monts et par vaux ? Avec quelle joie, par exemple, se trouve-t-il, le 31 juillet 1921, à Dar Caid Omar, pour visser le dernier boulon de la voie ferrée assurant, par Taza, la liaison entre le Maroc occidental et l'Algérie ! Malgré la chaleur — c'est le plein été — malgré l'aridité du site, il donne de l'ampleur à la cérémonie afin de marquer l'importance des progrès réalisés depuis 1914, date à laquelle la communication fut souvent difficile, souvent coupée et plus souvent encore attaquée par les tribus voisines. Tant de peines pour développer le « Maroc Utile » qui va de l'océan à l'Atlas et faire comprendre à l'opinion publique que « l'armée ne se bat pas pour le plaisir de se battre, mais agit dans le souci du meilleur service du pays ». C'est toujours sa grande théorie du militaire qui n'agit que pour préparer la place et seconder l'administrateur. Effectivement, c'est bien cela la réalité : tout le Maroc vit et s'organise dans la vibration, dans l'éblouissement d'une activité débordante et d'une intelligence ouverte à tous les problèmes pendant que les troupes maintiennent l'armature extérieure. 51
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| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Ven 21 Nov - 6:01 | |
| Photo communiquée par le Commandement supérieur des Troupes au Maroc 1921. Photo Flandrin, Casablanca Aux opérations d'Ouezzane, le Maréchal suit les phases du combat avec le Général Poeymirau et le Colonel Colombat. En pays Zaïan, le Maréchal surveille les opérations accompagné du Général Poeymirau et du Colonel Delmas. | |
| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Ven 21 Nov - 6:28 | |
| Il eût été dommage que tant de savoir-faire ne reçût pas une consécration officielle. II faut louer le Président de la République Millerand de l'avoir compris et d'être venu au Maroc, non en voyage de parade, mais en voyage d'études. Visitant le Maroc, l'Algérie et la Tunisie, il souligne en 1922 l'importance de cet empire méditerranéen que Prévost-Paradol entrevoyait déjà prophétiquement en 1862 et il s'émerveille, comme les ministres Bérard et Le Trocquer qui l'accompagnent, de ce qu'il voit au Maroc, après seulement dix années de protectorat : la pacification établie, le pouvoir temporel et le prestige du Sultan consolidés, le maghzen assaini et réformé, la justice et la probité introduites dans l'Etat, les finances améliorées et transformées, l'agriculture, l'industrie, le commerce modernisés, tous ces changements opérés dans le respect des mœurs et du statut des Marocains, au milieu d'une collaboration solide et confiante entre le Résident général et le Sultan, entre le protecteur et les protégés, et tout cela après l'épreuve de la guerre, dont tant de pessimistes annonçaient l'éventualité comme fatale pour le Maroc. Les chiffres parlent également au Président. Dans ce pays où il n'existait rien en 1912, il y a, en 1922, un grand port, à Casablanca, avec 1 kilomètre 1/2 de jetée, des quais, des terre-pleins qui assurent un trafic journalier de 1.700 à 2.000 tonnes, des petits ports secondaires au nord et au sud du Maroc, grâce auxquels le commerce total de l'empire chérifien dépasse le milliard, dont 63 % représente la part de la France; 3.000 kilomètres d'excellentes routes; 113 postes d'assistance médicale, 6 grands hôpitaux conçus et aménagés selon les méthodes les plus modernes, 268 établissements industriels d'une valeur de 174 millions de francs, etc., etc... Le bilan de dix années d'efforts soutenus s'avère étonnant, invraisemblable dans quelque ville que ce soit, dans n'importe quelle région productive, et Lyautey l'attribue, sans vouloir diminuer la part de tous les pionniers marocains, à ses dix ans de résidence, à son extraordinaire cas de longévité administrative : « Si, grâce au concours de tous, l'action gouvernementale a pu avoir au Maroc quelque efficacité, c'est, comme je le redis à toute occasion, bien plus à cette continuité qu'à mon humble personne qu'il faut en reporter le mérite. 52 | |
| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Ven 21 Nov - 8:55 | |
| Décembre 1921. Photo Flandrin, Casablanca 1922. - Rabat, Cliché Résidence Générale. Inauguration des Arènes de Casablanca. Le Maréchal et son escorte en promenade à l'Aguedal
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| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Ven 21 Nov - 9:04 | |
| Le voyage présidentiel à travers le Maroc est triomphal. L'accueil reçu dans chaque ville est grandiose, dans certains cadres féerique, inoubliable. Partout le maréchal explique : ici l'histoire de la pacification, là l'organisation de la région, ailleurs le programme des travaux réalisés ou en cours ; partout M. Millerand admire les nombreuses et importantes œuvres d'intérêt public qui ont surgi, comme par enchantement, depuis l'occupation française, et salue en Lyautey le général administrateur, tandis qu'à Taza, le 14 avril, à l'issue d'une revue des troupes, il honore le grand soldat en lui remettant la Croix de guerre des théâtres d'opérations extérieures et en le citant à l'ordre de l'Armée. Le maréchal Lyautey est, en effet, cité à l'ordre de l'Armée avec le motif suivant : « Après avoir assuré la garde vigilante du Maroc pendant la Grande Guerre, a continué à assurer avec son inlassable activité la pacification du pays, en faisant face en 1918 et en 1919, avec des moyens militaires réduits à l'extrême aux durs assauts suscités par nos ennemis aussi bien sur les confins sud que sur les frontières nord, réduisant en 1920 et 1921 les tribus guerrières des Zaïans, des Beni-Ouaraïn, des Djebalas d'Ouezzan, portant dès le début de la campagne de 1922 le plus rude coup aux Chleuhs et aux Marmouchas, mettant tout en œuvre pour obtenir des résultats définitifs, au prix des moindres sacrifices pour la France, et menant à bien cette grande œuvre grâce à sa lumineuse conception et à ses manœuvres habiles, grâce au dévouement absolu qu'il sut inspirer à ses troupes, animées par son souffle vibrant de Grand Soldat et de Grand Français. »
Au cours de ce voyage, le maréchal est assez heureux pour amorcer le principe, logique, d'une conférence annuelle des Gouverneurs et Résidents généraux de l'Afrique du Nord, dans le but d'établir entre eux des contacts très utiles pour la solution des questions communes aux trois provinces et très souvent, se trouvent mal traitées à cause des cloisons étanches qui existent entre ces dernières. Lyautey cherche ainsi à réaliser l'intégration du Maroc dans l'Afrique française, et ce ne sera pas un des moindres résultats de la visite du Président de la République que d'avoir contribué à la formation de ces points de contact entre la Tunisie, l'Algérie et le Maroc. 53
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| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Ven 21 Nov - 9:12 | |
| Photos Flandrin, Casablanca. Début 1922. - Percement du boulevard du 4° Zouaves. 9 Juin 1922. - Une visite en terre agricole | |
| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Ven 21 Nov - 9:16 | |
| 9 Juin 1922. - Photos Flandrin, Casablanca. Le Maréchal, M. Michel, M. Guillemet. Pose de la première pierre des Caves de Sidi Larbi. | |
| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Ven 21 Nov - 9:21 | |
| Dès 1923, en effet, se tient à Alger une première réunion, à laquelle assiste le maréchal, bien qu'il fût un peu fatigué, A son retour, une grave affection du foie s'étant déclarée, il doit s'arrêter en chemin à Taza, puis à Fès : son état est grave. Immédiatement le peuple marocain, qui a appris sa maladie, dit des prières pour lui et apporte à sa résidence, pour obtenir son rétablissement, deux cierges pris au sarcophage de Moulay Idriss et un flacon d'eau. Un si rare témoignage d'affection est particulièrement agréable au maréchal, dont l'étonnement grandit lorsque, s'étant remis debout, il est sollicité pour aller rendre visite à la célèbre mosquée de Moulay Idriss à Fès. Bien que très sensible à cette invitation, il se voit obligé de la décliner, parce que, chrétien, sa reconnaissance devait d'abord se manifester à son Dieu, et ensuite parce qu'ayant défendu formellement aux européens d'entrer dans les mosquées, il ne voulait pas être le premier à donner le mauvais exemple en enfreignant lui-même ses propres instructions. De tels faits montrent à la fois combien les Marocains aimaient le maréchal et de quelle délicatesse celui-ci faisait preuve à leur égard. Ils lui prouvaient également qu'en 1922, leur loyalisme était aussi grand qu'en décembre 1916, lorsque, partant pour le ministère de la Guerre, une quarantaine de Caïds du Sud lui rédigeaient une belle adresse d'attachement. Cette maladie était, hélas ! un signe précurseur, qui ne trompa guère Lyautey. S'étant fait opérer à Paris par le professeur Gosset, il sent le besoin de se reposer — il a soixante-dix ans — et offre sa démission au Gouvernement, qui la refuse pour le motif que la situation générale exige, tant en France qu'au Maroc, une « autorité ferme » et de « l'unité de vues et de la suite dans l'action ». Bien qu'il pense en avoir fait assez après avoir donné à sa patrie un empire de 400.000 kilomètres carrés de terres utilisables, il accepte de rester, obéissant au mot qu'il aurait pu écrire à son chevet et qu'il connaît depuis son enfance : Servir ! Les événements marocains, il faut en convenir, ne tardent pas à donner raison au Gouvernement français. A partir de 1924, la situation politique s'aggrave dans le nord du pays. 54
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| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Ven 21 Nov - 9:27 | |
| 9 Juin 1922. Photo Flandrin , Casablanca 1922. Mazagan Communiqué par l'Essi de Mazagan. Pose de la première pierre des Caves de Sidi-Larbi. Le Maréchal et M. de Caqueray. Le Maréchal et le Dr. Weisberger | |
| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Ven 21 Nov - 9:33 | |
| AVRIL 1923. Photo Flandrin, Casablanca 1° JANVIER 1924. Photo Flandrin, Casablanca. Le Maréchal et le Sultan Moulay-Youssef Etat d'avancement des travaux du port de Casablanca. | |
| | | Paul CASIMIR
| Sujet: LYAUTEY L'AFRICAIN Ven 21 Nov - 9:39 | |
| L'Allemagne, en abusant de la neutralité espagnole, arme Abdel Krim, dont la force et le prestige s'accroissent dans le Rif à la suite du désastre d'Anoual : l'Espagne, battue, retire ses troupes, supprime brusquement ses postes et laisse aux Rifains le champ libre en face de nous. Lyautey s'inquiète encore une fois pour le sort de « son Maroc ». Il réclame en France des troupes : on les lui refuse, parce que la Syrie et le Rhin en auraient également besoin; en réalité, la politique française est malheureusement au pacifisme et a les yeux bandés ou clos comme ceux de l'autruche. Le maréchal se demande comment, avec des moyens très réduits, il pourra résister au péril extérieur qui le menace, manifestant les plus grandes craintes pour sa frêle couverture de postes perdus dans le bled, sur les pitons tenus chacun par trente ou quarante tirailleurs indigènes encadrés, il est vrai, par de valeureux chefs. Il insiste donc pour qu'on lui envoie des secours et finit par les obtenir, mais avec un tel retard que ses plans ne peuvent plus jouer. Abdel Krim, enorgueilli par ses succès sur les Espagnols, les devance, lance contre nos soldats des attaques brusquées, investit les postes qui se défendent héroïquement, avec l'énergie du désespoir, et arrive à menacer Fès, où il a l'intention d'apparaître en Sultan. Voilà le raz de marée qui déferle; avec rapidité il gagne les Béni Zeroual, l'Ouergha, la région de Taza : la situation y devient très critique, désespérée, et l'on parle déjà d'évacuer la ville de Taza, l'infiltration rifaine étant complète, sans qu'il ait été possible d'opérer, en jonction avec les Espagnols, un mouvement tournant par Ajdir. Mais Lyautey ne veut pas évacuer Taza, car ce serait « une folie et une absurdité », et il donne l'ordre de tenir. Deux succès justifient son attitude, et dès le 6 juin 1925, il peut considérer la crise comme terminée. « A partir de juillet, dit André Maurois, le commandement des opérations passa entre les mains, d'abord du général Naulin, puis du maréchal Pétain. Le maréchal Lyautey avait demandé lui-même à être soulagé d'une responsabilité vraiment écrasante, puisqu'il avait à la fois à commander des troupes en guerre et à administrer un grand pays. Cependant, il est évident qu'il souffrit de cette dualité de commandement, dans un pays dont il avait si longtemps été le souverain unique. » 55
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| | | | LYAUTEY L'AFRICAIN | |
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